Personne ne savait depuis combien de
temps le palais du pacha Bouhad avait commencé à s’étendre. Six mois,
ou davantage ? Depuis lors, il se passait de drôles de choses à Karnab
la Magnifique. Des pâtés de maisons disparaissaient, littéralement
engloutis, pour laisser place aux nouvelles dépendances du palais.
Était-ce un palais d’ailleurs, ou une forteresse ? Avant d’y entrer,
Teyar avait essayé d’en faire le tour. En vain. L’édifice ne
paraissait pas avoir de fin, pas de forme définie… ni d’issues. À
l’est et au sud, une grande muraille sinuait contre des demeures
qu’elle semblait vouloir repousser. À l’ouest, ses contours se
fondaient dans le souk. Le battant laqué de la porte d’entrée
principale, sur la façade nord incrustée d’onyx, restait obstinément
clos. Il ne s’ouvrait que pour laisser passer des sacs de provisions,
des barils de vin de ronce, ainsi que les quelques prostituées qui
osaient encore se risquer à l’intérieur. |